Sabine Bourgey, Trésors, légendes et réalités, Éditions de l’Amateur, 1996, p. 22

            Deux sortes de personnes trouvent les trésors : les inventeurs qui trouvent par hasard et les chasseurs de trésors qui montent une expédition. Les premiers trouvent la plupart du temps des trésors de terre et appartiennent à des catégories socioprofessionnelles bien déterminées : ils sont maçons, ouvriers, terrassiers ou agriculteurs. Ils ont un grand coup de chance, un peu comme s’ils avaient gagné au loto ! Le trésor transforme un peu ou beaucoup leur vie matérielle. Ils n’en trouveront qu’un seul dans leur vie. Dans cette catégorie, on peut citer les ouvriers du trésor de la rue Mouffetard, les scouts de Saint-Wandrille, les terrassiers du trésor de Saint-Lô. Ils seront toujours très nombreux, car les trésors cachés sont innombrables.
 
            Les autres cherchent un trésor et ont le goût de l’aventure ! Certains sont même très célèbres : Franklin Roosevelt s’intéressa au trésor de l’île du Chêne au Canada. Konrad Adenauer, le chancelier allemand, fit des recherches sur le trésor des templiers de saint Martin, à Vence dans les Alpes-Maritimes. L’écrivain Villiers de l’Isle Adam avait ouvert un cabinet de chercheurs de trésors, et, de son propre aveu, Anatole France fouilla plusieurs tumulus en Bretagne. Même Balzac ne resta pas insensible à cette quête, puisque lorsqu’il résida à Bastia, en 1838, il se rendit en Sardaigne à la recherche d’une mine d’argent qui devait faire sa fortune. Mais l’argent était de l’antimoine et la mine un filon sans intérêt. Edgar Faure, enfin, ancien président de l’Assemblée nationale, ne cacha pas son intérêt pour la chasse aux trésors.
 
            Aujourd’hui, beaucoup de ceux qui montent une expédition s’intéressent la plupart du temps aux épaves. Ils sont souvent américains et ont le goût de ce qu’ils appellent le risky business (« les affaires risquées »). Ils peuvent être déjà très riches avant de trouver leur trésor, comme le capitaine Humphreys qui travaille sur le Maravillas, ou partir de rien, comme Mel Fisher qui doit sa fortune au Nuestra Senora de Atocha. Ils ont généralement des sociétés de recherche de trésors et sont des professionnels. Ils travaillent toujours sur plusieurs trésors et la richesse de l’épave est pour eux primordiale. Certains ne s’intéressent pas fatalement aux objets trouvés. Ils vendront. Ils ne font que rarement les recherches historiques personnellement et sont plus habiles dans la chasse…aux investisseurs. Il est toujours difficile d’évaluer leur fortune réelle. Elle est comme leurs galions : fluctuante ! Ils brassent beaucoup d’argent mais ne gagnent pas à tous les coups. Ce sont des joueurs dans l’âme avec en général un ego assez affirmé et un goût certain pour la publicité (sans elle, pas d’investisseurs). Certains d’entre eux ne dédaignent pas les aventures militaires. S’ils ne deviennent que rarement très riches, ils ont moins une vie selon leur goût. Ils se forgent un destin et le maîtrisent parfois.